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Rétro années 70 : La Maki, voiture de F1 japonaise aux performances décevantes

Rétro années 70 : La Maki, voiture de F1 japonaise aux performances décevantes

Jeudi 11 avril 2024 par René Fagnan
Crédit photo: Wikimedia Commons

Crédit photo: Wikimedia Commons

Les années 70 représentent l’âge d’or des écuries de Formule 1 qui construisaient des ”kit cars”. Il suffisait de fabriquer un châssis, de produire une carrosserie, d’y greffer un moteur V8 Ford Cosworth DFV et une boîte de vitesses Hewland pour aller courir en Championnat du monde !

La F1 était accessible à cette époque et cette grande simplicité technique incitait des groupes de passionnés à fabriquer une monoplace basique et tenter la grande aventure.

Après le départ de Honda des courses de Grands Prix en 1968, le Japon tente de se refaire une image en sport automobile. Deux Japonais ambitieux, Kenji Mimura et Masao Ono, créent en 1973 une structure, Maki Engineering, destinée à produire une nouvelle voiture de F1 autre qu’une Honda. Mimura, ingénieur de formation, commence le travail de design.

Dévoilée en mars 1974 à l’hôtel Carlton Towers de Londres, la Maki F101 est une monoplace hyper classique avec son châssis monocoque en aluminium, un moteur atmosphérique V8 Cosworth DFV et une boîte de vitesses Hewland à cinq rapports. Cependant, elle se démarque nettement des autres voitures de F1 par ses dimensions extra-larges.

Elle est pataude, large, haute et est, semble-t-il, trop lourde de 150 kilos ! Dès les premiers essais, effectués par l’ancien pilote BRM Howden Ganley, elle sous-vire énormément. Sa carrosserie aux formes inusitées, dont une prise d’air haut perchée, des pontons extra longs, un bouclier avant pleine largeur et cette étrange verrière jaune semblable à celle d’un avion de chasse créent beaucoup de traînée et perturbent la circulation de l’air, ce qui fait vite surchauffer le moteur.

L’écurie Maki annonce que son premier pilote est Ganley et Shaw Hayami (de son vrai nom Shotetsu Arai) devrait être au volant d’une deuxième voiture, ce qui ne s’est jamais fait, faute d’argent. Les organisateurs du Grand Prix de Monaco refusent l’inscription de la Maki. La petite équipe modifie la monoplace (qui devient la F101B) et parviennent à lui faire perdre quelques kilos.

Ganley rate sa qualification en Grande-Bretagne et percute les rails de sécurité du Nürburgring en Allemagne à cause d’un bris de suspension. Ganley s’en tire avec des graves fractures aux jambes et la Maki 101B est partiellement détruite.

Dans une interview accordée au magazine britannique Motor Sport, Howden Ganley raconte que tout a commencé quand il a été contacté par deux Japonais qui employaient des noms fictifs empruntés à ceux qui avaient planifié l'attaque de Pearl Harbour...

Ganley trouve un local pour loger l’équipe en Grande-Bretagne et la voiture est expédiée en pièces détachées depuis le Japon. Il effectue des essais à son volant et se rend compte que les modifications qu'il suggère ne sont jamais effectuées.

Au début de son premier tour sur le Nürburgring, la Maki pivote brusquement vers la droite et percute le rail. La section avant du châssis est arrachée et Ganley a les deux jambes fracturées. Un enquêteur a démontré qu'une biellette de direction avait cassé. Il y avait bien une rondelle de sécurité, mais la rondelle était plus petite que le trou et elle a tout simplement glissé à travers. Il a aussi découvert en grattant la peinture que le châssis avait été assemblé avec de simples pop-rivets...

Une nouvelle monoplace, pas plus rapide

En 1975, Maki produit une nouvelle voiture, la 101C, un peu moins extravagante, obtient un premier commanditaire, japonais, les montres Citizen, et décroche un contrat de pneus avec Firestone. Dave Walker est annoncé comme pilote, mais au dernier moment, c’est un Japonais peu connu, Hiroshi Fushida, qui prend le volant de la Maki chaussée de pneus Goodyear aux Pays-Bas.

Le pauvre Fushida roule en 1’33”37 alors que l’avant-dernier qualifié, Wilson Fittipaldi, a tourné en 1’24”15 ! Après deux non-qualifications, Fushida est remplacé par le champion de la F3 britannique, Tony Trimmer, qui a beaucoup de mal à dialoguer avec les membres de l’écurie japonaise. S’en suivent trois qualifications ratées.

Les membres de l’écurie Maki ne baissent toutefois pas les bras. Ils modifient encore la monoplace, l’allègent et refont sa carrosserie. Très vite, ils se rendent compte que l’aérodynamique est raté. Cette F102A manque d’adhérence dans les sorties de virages et à peu près toutes les composantes mécaniques tombent en panne les unes après les autres.

La voiture est inscrite au Grand Prix du Japon 1976. Trimmer roule un tour à la fois, tombant toujours en panne. Durant les qualifications, il effectue un tour de la piste de Fuji en 1’30”91 alors que le dernier qualifié, Masami Kuwashima, a tourné en 1’17”90 à bord de sa Williams FW05… C'est la fin de l'aventure Maki. Ajoutons pour terminer que Howden Ganley mentionne qu'on lui a affirmé que Honda se cachait derrière ce projet, mais il n'en a jamais eu la preuve.