La saison 1988 de Formule 1 a très mal commencé pour Ayrton Senna qui fut disqualifié lors du Grand Prix du Brésil, sa course à la maison devant des dizaines de milliers de partisans rassemblés pour l’acclamer.
Après avoir passé trois saisons avec le Team Lotus, le Brésilien Ayrton Senna arrive chez McLaren en 1988 en compagnie du fantastique moteur Honda V6 turbo. Cette fois, il doit affronter un coéquipier de taille en Alain Prost.
Cependant, la gestation de la McLaren MP4/4 Honda turbo a été beaucoup plus complexe que prévu et les retards se sont accumulés. Le premier exemplaire de la monoplace est enfin terminé le 22 mars et est immédiatement expédié au circuit d’Imola où se terminent les derniers essais présaisons.
Senna et Prost prennent le volant de cette MP4/4 le 23 mars, neuf jours seulement avant les premiers essais du vendredi au Brésil. Sans toucher aux réglages, elle vole littéralement sur la piste. Senna réalise un chrono deux secondes plus rapide que le meilleur temps réalisé durant ces essais par Gerhard Berger aux commandes d’une Ferrari !
Sur le circuit de Jacarepagua, Senna inscrit la pole position en 1’28”096, soit 0”54 d’avance sur la Williams FW12-Judd de Nigel Mansell et 0”68 sur la McLaren de Prost.
Il fait très chaud dimanche 3 avril avant le départ et le ciel est très nuageux. Les 26 voitures effectuent un tour de chauffe et se placent sur la grille. Le signal va être donné quand c’est la panique. Senna agite les bras dans les airs.
Au moment de sélectionner le premier rapport, son levier de vitesses a cassé net. Il ne peut démarrer et effectuer le tour de chauffe. En même temps, la March 881-Judd de Capelli fume dangereusement à la suite du bris d’une canalisation d’eau. L’Eurobrun ER188-Ford d’Oscar Larrauri est elle-aussi immobilisée à cause d’un ennui électrique. La procédure de départ est donc interrompue.
Senna saute de sa monoplace immobilisée et court à toute vitesse vers le garage McLaren où le mulet (la voiture de rechange) est préparé pour lui en catastrophe. Heureusement, Senna a roulé à bord du mulet plus tôt durant le week-end et il est adapté à ses réglages. Senna démarre donc des puits et joint le peloton en 26e et dernière position.
On l’a dit : cette McLaren vole sur la piste ! Après cinq tours, il est déjà en 13e position. Après 10 tours, le voilà qui occupe la huitième place. Et au 20e tour, c’est incroyable, Senna roule en seconde position derrière son coéquipier, Alain Prost. La foule est en délire !
Un défaut d’usinage
Au 27e tour, Senna s’arrête aux puits pour un changement de pneus. Il s’agite dans le cockpit afin de signaler aux mécanos de nettoyer les radiateurs, car son moteur a tendance à chauffer. Son arrêt dure une trentaine de secondes et Senna chute en sixième position derrière la Benetton-Ford de Thierry Boutsen.
La chevauché de Senna prend fin au 31e passage. En effet, le règlement sportif - pourtant bien connu par tous les membres de l’écurie McLaren, incluant Ron Dennis - interdit à un pilote de changer de voiture une fois la procédure de départ enclenchée.
Un officiel présente donc le drapeau noir et un panneau indiquant No. 12 à Senna qui doit obligatoirement rentrer aux puits, car sous le coup d’une disqualification. La mort dans l’âme, Senna effectue un dernier tour de piste et rentre sagement, amèrement déçu de ne pas offrir un beau résultat à ses partisans, d’autant que c’est Prost qui récolte la victoire.
Matthew Jeffrey, un ingénieur du département de design de l’écurie McLaren a plus tard expliqué que c’est la tige métallique du guide du levier de vitesses qui a cassé au moment du départ. Lors de l’usinage de cette pièce, la machine l’a percé un peu trop profondément, ce qui a sérieusement amincie la paroi. Lorsque Senna a tiré sur le pommeau pour sélectionner le premier rapport au moment du départ, la tension exercée fut trop forte et la tige a cassé. Évidemment, un lot de cette pièce modifiée fut rapidement réalisé.
Lors de la course suivante, le Grand Prix de Saint-Marin, Senna a remporté la victoire devant Prost.
3 avril : Ayrton Senna est disqualifié devant ses partisans au GP du Brésil en 1988
Jeudi 3 avril 2025 par René Fagnan
Crédit photo: Galeron