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L’électrification des véhicules : Une solution toujours d’avenir… ou déjà dépassée ?

L’électrification des véhicules : Une solution toujours d’avenir… ou déjà dépassée ?

Mardi 21 janvier 2025 par Marc Cantin
Crédit photo: BYD Media

Crédit photo: BYD Media

Si le monde du sport automobile se tourne de plus en plus vers les biocarburants et l’hydrogène pour remplacer l’utilisation, toujours abondante et disponible, du pétrole, et alors que le Championnat du monde de Formule E (les monoplaces à propulsion électrique) poursuit sa route sans trop de turbulences dans l’ombre de la Formule 1 et des autres séries mondiales, l’industrie des véhicules électriques (VÉ pur, branchable et hybride) a connu une année 2024 mouvementée. Laissons de côté les projets politiques sans vision, au Québec et ailleurs, pour se concentrer sur la réalité : selon un rapport de NASDAQ (EV Market Forecast: Top Trends for EVs in 2025), plus de treize (13,3) millions de véhicules électriques (VÉ) ont été vendus dans le monde dans les premiers 10 mois, une augmentation de 24% par rapport à 2023 sur la même période. La Chine est le principal facteur de cette hausse avec une augmentation de 38% avec 8,4 millions d’unités vendues. L’Amérique du Nord a connu une progression de 8% alors que l’Europe a baissé son chiffre de 3%.

État objectif de la situation

Cette performance mixte s’explique en partie par la vente en Chine de 360 000 nouveaux VÉ Seagull, fabriqués par BYD, le plus important fabricant de VÉ branchables au monde. Fondé en Chine en 1995, BYD est l'entreprise privée qui emploie le plus de personnes au monde depuis 2022, juste derrière plusieurs entreprises d'État. En septembre 2024, BYD employait 900 600 personnes, dont 104 003 dans le domaine de la recherche et du développement (R&D). L'entreprise est également en tête pour les demandes de brevets, avec plus de 13 000 brevets déposés entre 2003 et 2023. En comparaison, le deuxième fabricant automobile au monde, le groupe VAG (Volkswagen), répertorie 652 000 employés, devant Toyota (380 000) et GM (235 000). Imaginez la puissance de créativité d’une entreprise comme BYD. Elle a de quoi effrayer la concurrence, notamment celle des manufacturiers japonais, coréens et occidentaux qui se voient imposer un chiffre sans cesse plus grand de fabrication de véhicules électriques par leurs gouvernements, quand bien ceux-ci ne répondent pas aux besoins de la majorité de la population et, surtout, sont nettement plus coûteux que ce que BYD ne pourra jamais proposer.  

La Seagull se vend 9 700 $US en Chine pour le modèle de base. Au Canada, si elle était un jour importée, elle se détaillerait, selon divers experts, aux environs de 16 000$CDN. Cette toute nouvelle famille, la Seagull de base et ses variantes, avec des batteries au sodium en remplacement du lithium, procure une autonomie respective de 305 et 405 km. Elle fait oublier les horreurs asiatiques d’antan trop élémentaires. Bien conçue, la petite nouvelle est attirante, fiable et performante selon les premiers rapports des clients et la presse spécialisée internationale. Exactement ce que l’acheteur potentiel typique recherche.

En réponse à cette "menace", l'Administration Biden avait augmenté les droits de douane sur les VÉ chinois à 100% en 2024 et a exclu les VÉ importés d'un crédit d'impôt fédéral de 7 500 $US. L'Union européenne a également imposé ses propres droits de douane sur les VÉ chinois, allant de 17,4 % pour BYD à 38,1 % pour SAIC Motor Company. Au Canada, un droit de douane de 100% a été imposé à compter de novembre 2024, venant annuler (provisoirement ?) l'arrivée de la marque BYD. Mais au moment même où les crédits à l’achat de VÉ se voient annulés les uns après les autres par les gouvernements, la question mérite désormais d’être posée : le futur est-il vraiment aux VÉ ?

Les analystes crédibles prévoient un brillant avenir pour la gamme Seagull, et d’autres EV similaires déjà en gestation chez les autres grands fabricants (ces mêmes maisons qui ralentissent la production et même abandonnent les plus gros et dispendieux modèles plus chers après avoir constaté que les gros prix et l’abolissement des crédits gouvernementaux réduisent la demande des plus gros VÉ à travers le monde). On attend donc, comme voulus par plusieurs gouvernements, pour 2025 et au-delà de nouveaux modèles à l’image de la Seagull de la part de grands fabricants américains et européens.

Ce passage bien lancé à court terme vers les plus petits VÉ adaptés aux besoins criants des grands centres urbains semble logique. Mais ailleurs ? Les gouvernements concernés devront mettre leurs culottes et résister aux lobbys des industries qui profitent des longs délais et des gros véhicules et grandes industries les plus polluantes dans l’intérim. Il demeure urgent pour beaucoup d’imposer l’électricité dans les endroits critiques, comme les grands centres méga-urbains à plus court terme que 2035, une date trop loin pour réagir à l’extrême urgence climatique d’aujourd’hui, et la disponibilité des technologies nécessaires à l’implantation. Cela fait évidemment fi d’une réalité trop souvent occultée : un VÉ doit parcourir en moyenne 100 000 km (85 000 au Québec, selon certaines études) pour voir son empreinte environnementale être moindre qu’un véhicule à essence.

C’est l’un des défis majeurs des fabricants de VÉ : corriger le fait que les VÉ produits actuellement polluent plus au total que les voitures au pétrole, spécialement lors de leur fabrication. Elles polluent certes moins lors de leur usage (sans toutefois être zéro émission de polluants comme la publicité à leur sujet le laisse croire aux consommateurs !) et une fois leur vie sur les routes clôturée (que faire des batteries une fois trop vieilles ?), en plus des pertes d’efficacité de production et distribution de l’électricité.

En bref, l’industrie doit absolument continuer à augmenter l’utilisation de méthodes et composantes déjà inventées : éléments légers, composites comme le graphène, moteurs à essence plus efficaces et d’autres technologies qui viendront compléter l’offre des VÉ, sans les laisser seuls sur le marché, ce qui est aujourd’hui acquis que c’est tout simplement impossible. Et même le projet politique d’urbanisation par petits VÉ n’offre pas à court terme (on parle ici de 2035) une solution électrique réaliste et viable pour les autres grandes applications reliées au transport (avions de ligne, camions et navires lourds sur de grandes distances, production pour l’industrie et la consommation urbaine de tous les jours).

La question de base se pose partout : l’électricité est-elle le bon choix pour réduire à moyen terme les effets néfastes du pétrole pour toute la planète, du moins assez pour justifier les coûts du mégaprojet ? Oui et non ! Oui, pour répondre à l’urgence posée par la pollution massive dans les plus grands centres mondiaux, avec des petits VÉ évolués. Pour le reste, c’est non comme solution globale pour tous les transports en général. L’infrastructure mobile et stationnaire à refaire dépasse l’imagination et les technologies éprouvées et connues aujourd’hui. Créer de nouveaux avions qui accepteront au-delà de 350 passagers, des moteurs de plus de 10 000 chevaux pour les gros cargos, des camions transcontinentaux rentables, en plus des infrastructures pour les accommoder, n’est pas une mince affaire. De plus, les matières premières seraient contrôlées par la Chine, qui se prépare depuis 20 ans à dominer ce marché essentiel au passage à l’électricité plus généralisé.

Pour faire simple : changer le pétrole pour l’électricité, donc les batteries, change simplement notre dépendance ! Compagnies pétrolières d’un côté, gouvernements et Chine de l’autre. Voici quelques chiffres pour démontrer l’ampleur du défi : la consommation mondiale totale d’électricité est passée de 7323 Méga Watt-Heure (MWH) en 1980 à 27,064 MWH en 2023, donc quadruplée en 45 années !  La quantité totale d’énergie produite annuellement par le pétrole et que l’électricité devrait éventuellement remplacer le mieux possible le cas échéant est de 140 000 000 MW-H, ou cinq fois la consommation annuelle d’aujourd’hui. Autant estimer le nombre de grains de sable à Miami Beach !

Des sources alternatives à l’électricité

L’hydrogène apparaît comme la solution d’avenir qui succédera à l’électricité. À court terme. L’énergie nucléaire provenant de la fusion est aussi une technologie mature et bien en place pour des applications navales, industrielles, municipales et pour les habitations. Les méthodes de production ne sont pas parfaites et les producteurs devront appliquer des règles de sécurité et de défense contre les attaques possibles plus sévères que par le passé. Si les sources d’une solution nucléaire sont généreuses, la sécurité et la disposition des déchets nucléaires demeure les plus importants défis associés à un tel choix.

De son côté, la physique de l’infiniment petit, dite quantique, en grand développement depuis quelques années, servira entre autres à des ordinateurs hyper rapides et d’une grande utilité pour l’intelligence artificielle (IA). Un moteur quantique existe déjà, mais seulement en simulation. Il offre théoriquement une efficacité thermique sur papier de 40% par rapport au pétrole, avec 50% possible à court terme, alors que les moteurs à combustion interne (CI) d’aujourd’hui peinent à atteindre 30%.

Associée à l’atome, la physique quantique, au comportement totalement différent de la physique traditionnelle, a permis aux mathématiciens et physiciens théoriques de créer des simulations sur ordinateur de moteurs puissants et surtout au carburant inépuisable selon la formule E=mc2 (Énergie produite = Masse consommée x Vitesse de la lumière au carré). Cela adopte la formule fondamentale de la relativité spéciale annoncée par le réputé physicien théorique Albert Einstein en 1905 et qui a mené aux bombes atomiques en 1945.

Les grands esprits mondiaux travaillent sur d’autres approches : batteries évoluées basées sur les aimants, métaux et terres rares (des ressources contrôlées en grande partie par la Chine), systèmes de gestion de batteries (BMS), magnésium, fibre de carbone, aluminium, titane, fibre de verre et acier à haute dureté, postes de recharge évolués, et autres solutions à valider moins ébruitées.

Le remplacement du pétrole à l’échelle mondiale, voulus par plusieurs, dépasse les normes connues de grands projets surtout dus à son ampleur, son urgence et le besoin d’inventer des solutions techniques encore inconnues pour les moteurs et les infrastructures. De plus, le financement reste encore à trouver, surtout devant la lenteur des gouvernements à prendre des décisions et la résistance de quelques grandes entreprises qui font des tonnes de profits avec les systèmes en place. Laissons donc de côté des projets inutiles et hors de prix, comme visiter Mars ou refaire le toit d’un trop célèbre Stade Olympique, pour regarder objectivement la situation…