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22 octobre : Meneurs au championnat du monde, Senna et Prost s’accrochent au GP du Japon en 1989

22 octobre : Meneurs au championnat du monde, Senna et Prost s’accrochent au GP du Japon en 1989

Mardi 22 octobre 2024 par René Fagnan
Crédit photo: Galeron

Crédit photo: Galeron

Les amateurs de Formule 1 savent bien que le Grand Prix du Japon de 1989 a été marqué par le plus-que-célèbre accrochage entre les deux coéquipiers de l’écurie McLaren-Honda, Ayrton Senna et Alain Prost, également meneurs au championnat du monde à ce moment-là. Cet accrochage, commenté en long et en large par des experts et des amateurs, n’en finit pas de faire polémique. Senna a-t-il tenté d’effectuer un dépassement suicidaire sur Prost ou ce dernier a-t-il tout simplement donné un coup de volant presque identique à celui qu’a donné Michael Schumacher à Jacques Villeneuve à Estoril en 1997 ?

Il faut avouer que l’ambiance était pourrie chez McLaren durant cette saison 1989. Les deux pilotes se sont faits des coups discutables en piste et cela a mené à avoir deux équipes distinctes qui ne se parlent plus sous l’auvent. Les ingénieurs de Senna ne discutaient plus avec ceux de Prost et chaque groupe conservait jalousement ses réglages.

Puis, la paranoïa s’est emparée des deux protagonistes, spécialement de Prost qui clamait que Honda favorisait Senna. Le président de la FIA, l’irascible Jean-Marie Balestre, a alors exigé que Honda traite les deux pilotes de la même façon, ce qui a grandement irrité les Japonais.

En cette fin de saison où Prost et Senna mènent le championnat du monde, Senna doit impérativement gagner les deux derniers Grands Prix s’il veut espérer conserver sa couronne. Prost prévient alors le bouillant Brésilien : il ne lui fera pas de cadeaux.

Si Senna est bourré de talent, il a un gros défaut : il est convaincu de toujours être dans son bon droit. Peu importe la manœuvre qu’il effectue ou la décision qu’il prend, il est totalement persuadé d’avoir raison. Et c’est justement ce qui est survenu à Suzuka le 22 octobre 1989.

Aux commandes de sa McLaren MP4/5 Honda, Senna réalise la pole position devant Prost. Mais au moment du feu vert, Prost effectue un meilleur démarrage que Senna et passe en tête. Prost mène la course et tout le monde effectue un changement de pneus peu après le 20e tour. Par la suite, Senna rejoint Prost et les hostilités commencent. Le Brésilien cherche à doubler son rival, mais n’y parvient pas. Les deux McLaren roulent comme collées l’une à l’autre.

Un affrontement qui mène à un accrochage

C’est au 47e tour que Senna prépare son coup et plonge au freinage de la chicane pour tenter de doubler son coéquipier. C’est l’accrochage et les deux voitures muettes échouent au bord de l’échappatoire. Prost s’extirpe de son cockpit tandis que Senna s’énerve et exige que les commissaires poussent sa monoplace pour faire redémarrer son V12. Ce qui est fait et Senna revient en piste, s’arrête pour faire changer son aileron avant amoché, remonte sur la Benetton l’Alessandro Nannini qui mène la course, la double et croit avoir gagné.

Mais non, Senna est disqualifié pour avoir effectué son dépassement en roulant sur la zone de décélération des puits qui ne fait pas partie de la piste, pour avoir reçu une aide extérieure pour faire redémarrer son moteur et pour avoir court-circuité de la chicane. Senna est persuadé d’avoir bel et bien gagné la course de façon correcte et loyale, et est convaincu d’être la victime d’un complot français Prost-Balestre, car Prost est automatiquement sacré Champion du monde.

D’un point de vue règlementaire, l’assistance des commissaires était formellement interdite à cette époque. Senna devait donc être disqualifié. Cependant, ne pas avoir négocié la chicane est discutable, car pour le faire, Senna aurait dû rouler face au trafic pour virer à gauche et prendre la chicane. Il présumait qu’en court-circuitant la chicane, il respecterait le règlement. Avoir roulé sur la zone de décélération est aussi discutable. Senna n’avait pas quatre roues hors-piste et si on regarde bien les images vidéo et les photos, il est à peu près impossible de doubler un rival sans mordre un peu dans cette zone afin de déboiter du sillage de l’autre voiture.

Dernier point, Prost avait prévenu Senna qu’il ne lui ouvrirait pas la porte. Il a respecté sa parole, car quand on regarde bien, Prost a braqué son volant vers la droite bien plus tôt que d’ordinaire, bien avant d’arriver au premier virage de la chicane. Il a voulu ferme la porte, mais Senna était déjà à ses côtés. Voulant éviter de se faire doubler, Prost a donné un coup de volant pour faire freiner Senna plus tôt que prévu et ainsi demeurer devant lui. Cependant, Senna est resté à ses côtés, ce qui a mené à l’accrochage.

Alors qui est fautif ? Les deux en fait : Senna qui fonce sans se méfier et Prost qui vire à sa droite avant de prendre le virage. Ron Dennis, leur patron, a aussi péché, car il a laissé la pression monter au sein de son écurie sans vraiment se méfier du niveau de conséquences qui pouvait en résulter.