Le pilote italien Michele Alboreto a remporté sa première victoire en Formule 1 à l’occasion du Grand Prix du Caesar’s Palace présenté sur un circuit temporaire minable planté dans le terrain de stationnement de l’hôtel/casino du même nom à Las Vegas le 25 septembre 1982. À noter qu’il ne s’agissait pas d’une édition du Grand Prix des États-Unis comme l’était Long Beach, mais bien du Grand Prix du Caesar’s Palace.
Cette funeste saison 1982 se termine enfin avec cette épreuve que tout le monde redoute. L’année fut marquée par les luttes de pouvoir impliquant la FOCA (association des écuries de F1) et la FIA, la guerre entre les équipes qui emploient un moteur atmosphérique et celles qui utilisent un turbo, les décès de Gilles Villeneuve et Riccardo Paletti, le terrible accident de Didier Pironi, et le fait que seuls deux pilotes peuvent espérer coiffer la couronne mondiale à Las Vegas : Keke Rosberg de Williams et John Watson de McLaren.
Rosberg profite de la perte de Villeneuve et de Pironi et des casses mécaniques à répétition des Renault turbo pour se présenter en tête du classement, aussi incroyable que cela puisse paraître.
Les Renault d’Alain Prost et de René Arnoux accaparent la première ligne de départ devant Alboreto (Tyrrell-Ford DFV), Eddie Cheever (Ligier-Matra V12), Riccardo Patrese (Brabham-BMW), Keke Rosberg (Williams-Ford DFV) et Mario Andretti sur la seconde Ferrari.
Alboreto, âgé de 25 ans, est une valeur montante. À sa deuxième saison en F1, il a terminé une fois troisième et trois fois quatrième au volant d’une Tyrrell 011 pataude qui ressemble plutôt à un camion. Conçue par Maurice Philippe et Brian Lisles, la 011 est propulsée par un moteur V8 Ford Cosworth DFV de trois litres et malgré son apparence joufflue, elle affiche le poids minimum légal de 540 kilos. En fait, si elle est limitée par la faible puissance de son moteur Ford, face aux turbos elle est agile, efficace, freine bien et change aisément de direction.
Un circuit indigne d’une finale du championnat du monde
Sur ce circuit temporaire de 3,650 km qui ne comporte pas moins de 13 virages, les voitures atmosphériques détiennent un avantage sur les bolides turbo. Le tracé est bordé de murets en béton et la piste, plantée au milieu du désert, est poussiéreuse à souhait.
En lever de rideau, la course de la série Can-Am est remportée Danny Sullivan au volant d’une March-Chevrolet de l’écurie Newman Budweiser. “Oncle” Jacques Villeneuve s’est classé 21e aux commandes de sa petite Osella à moteur deux litres BMW, n’ayant parcouru que 42 des 66 tours de la course.
Le Grand Prix démarre et on assiste à une domination des deux Renault. Derrière elles, Alboreto roule en troisième place devant Patrese et Cheever. Prost éprouve déjà des ennuis de freins et Arnoux le double. Quelques tours plus tard, Prost profite de ses freins refroidis et des ennuis de moteur d’Arnoux pour reprendre la commande.
Au 20e tour, Arnoux rentre aux puits et abandonne. Quant à Rosberg qui joue le titre mondial, il roule avec précaution et évite toute confrontation directe avec ses rivaux. Son objectif est de terminer et de marquer quelques points.
L’avance de Prost sur Alboreto se réduit progressivement. Les pneus Michelin de la Renault s’encrassent des boulettes de gomme qui trainent par terre et la voiture est fortement secouée lors des freinages. Alboreto talonne Prost et trouve l’ouverture pour le doubler au 52e passage. C’est la joie dans le clan Tyrrell, car l’équipe du grand Ken n’a pas goûté au champagne depuis la victoire de Patrick Depailler à Monaco en 1978 !
Alboreto n’est pas inquiété et croise l’arrivée en vainqueur, récolant ainsi sa première victoire en F1. Watson termine deuxième devant Cheever, Prost et Rosberg. C’est la fête chez les équipes Tyrrell et Williams. L’écurie de Ken Tyrrell célèbre sa 22e victoire en F1 tandis que chez Williams, qui disputait son 100e Grand Prix, c’est la consécration; un second titre mondial après celui acquis par Alan Jones en 1980.
Le podium est kitch au possible. Des légionnaires romains accompagnent les trois premiers et la chanteuse Diana Ross place une couronne de lauriers, typiquement Jules César, sur la tête d’Alboreto.