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Rétro 1992 : La Galmer G92, la voiture qui ne devait pas gagner l’Indy 500 et qui a triomphé !

Rétro 1992 : La Galmer G92, la voiture qui ne devait pas gagner l’Indy 500 et qui a triomphé !

Mercredi 10 juillet 2024 par René Fagnan
Crédit photo: Archives IMS

Crédit photo: Archives IMS

En 1992, 21 des 24 écuries inscrites à la série CART/IndyCar emploient des châssis fabriqués par Lola. Un monopole. Deux autres utilisent des Penske et une seule, Galles-Kraco, a misé sur un châssis “maison” produit par Galmer.

Rick Galles est alors un méga concessionnaire Chevrolet au Nouveau-Mexique et engage une écurie en série Can-Am et récolte le titre avec Al Unser junior. Puis, Galles monte en série CART et remporte le titre en 1990, toujours avec Unser. En 1991, Galles fusionne avec l’écurie Kraco Racing de Maury Kraines et a l’idée de faire rouler un châssis maison unique.

L’ingénieur en chef de l’équipe Galles est le Britannique Allan Mertens qui a occupé le même poste chez March entre 1976 et 1988. Depuis cette dernière date, il est le propriétaire de la société d’ingénierie Galmer implantée à Placitas au Nouveau-Mexique.

Mertens a travaillé avec Adrian Newey chez March. Une monoplace de série CART n’a plus de secrets pour lui. Lui et son équipe définissent ce qui sera la G92 de 1992 et commencent à dessiner les plans. Un premier châssis est produit chez Galmer à Bicester au Royaume-Uni. Quand il est passé au banc de torsion, Mertens se rend compte qu’il est extrêmement rigide, mais que la cloche d’embrayage ne l’est pas suffisamment. Cela rendra sûrement la voiture imprévisible en entrée de virages.

Cependant, Mertens conçoit un diffuseur soufflant (comme en Formule 1), ce qui devrait aider à stabiliser le train arrière sur les ovales. Le turbocompresseur est tourné afin que l'entrée d’air pointe vers l'avant et l'échappement vers l'arrière. Cette solution permettait d'avoir deux échappements avec deux soupapes de décharge qui soufflaient dans le diffuseur.

Dès les premiers essais sur le super ovale d’Indianapolis, Mertens se rend compte que sa G92 génère le niveau d’appui prédit, mais produit beaucoup trop de traînée. C’est comme si elle traînait un parachute derrière elle. Pour l’ovale hyper rapide d’Indy, c’est le pire des ennuis.

Danny Sullivan, le coéquipier de Unser chez Galles-Kraco, gagne la course de Long Beach disputée avant l’Indy 500. Si la G92 est lente en ligne droite, elle est rapide dans les virages. Avec son moteur V8 Chevy-A, elle est toutefois désavantagée en comparaison des V8 plus puissants que sont le Chevy-B du Team Penske et le nouveau Ford-Cosworth XB des écuries Newman-Haas et Chip Ganassi.

Un froid de canard

Sullivan se qualifie en huitième place et Unser en 12e pour l’Indy 500. Si le mois de mai a connu une météo favorable, cela change dramatiquement durant la nuit du 23 au 24 mai. Un front froid fait chuter le mercure à neuf degrés et le vent souffle à près de 40 km/h. Le coefficient de refroidissement éolien fait ressentir une température de deux degrés sous zéro !

C’est ainsi que le point faible de la Galmer devient son arme secrète. Face à cette piste presque gelée, les autres écuries n’ont d’autres choix que d’incliner les ailerons de leurs voitures tandis que la G92 est parfaite, générant l’appui aérodynamique qu’il faut.

La course tourne en un festival d’accidents. C’est comme de rouler sur du verglas. Treize des 33 partants fracassent leurs voitures contre le muret en béton. Michael Andretti, aux commandes d’une Lola-Ford de l’écurie Newman-Haas, domine la course. Quand il aborde son 189e tour de piste, il en a mené 160 et roule avec une avance de 28 secondes sur le Torontois Scott Goodyear.

Et c’est à ce moment que la fameuse malchance des Andretti frappe à nouveau. La pompe à carburant de la voiture de Michael lâche soudainement. Au même moment Unser, au volant de la Galmer, double Goodyear. La Lola d’Andretti s’immobilise en piste, ce qui cause une neutralisation.

Le vert est agité avec sept tours à compléter. Les deux voitures roulent collées l’une à l’autre. La Galmer est devenue survireuse et Unser sent le train arrière parfois lui échapper. Dernier tour. Dans le virage 4, Unser doit légèrement lever le pied de l’accélérateur afin d’empêcher l’arrière de trop glisser, ce qui permet à Goodyear de se coller à lui. Sur la dernière ligne droite, Goodyear zigzague afin d’énerver Unser, mais cela ne fonctionne pas. Goodyear déboîte sur la gauche de Unser, remonte, remonte… Mais la Galmer franchit la ligne avec un très mince avance de seulement 0”043, soit une cinquantaine de centimètres.

Il y a une anecdote intéressante à propos de cette Galmer. Sur toutes les autres monoplaces de la série CART, les transpondeurs de chronométrage étaient logés dans le ponton gauche. Sur la Galmer, il n’y avait pas suffisamment d’espace à cet endroit, et les transpondeurs étaient fixés dans le nez des G92.

Puisque les transpondeurs des voitures d’Unser et de Goodyear n’étaient pas situés au même endroit, la marge de victoire de 0”043 fut corrigée par les responsables de l'USAC à 0”0331. Toutefois, la marge officielle de 0”043 demeure dans le livre des records de la série.

Valvoline a conservé la Galmer gagnante de l’Indy 500. Deux autres Galmer furent vendues aux écuries Burns Motor Sports et PacWest Racing en 1993 et ce fut la fin de l’aventure. La G92 n’aura donc gagné de deux courses, incluant la plus importante de toutes !