Quoi ? Une Citroën ID a vraiment gagné en NASCAR ? Une voiture française qui n’avait rien de sportif s’est imposée dans une course automobile aux États-Unis ? Non, pas possible.
Eh bien oui. Si elles n’avaient rien de très sportif, la ID et la DS ont pourtant connu du succès en sport automobile, que ce soit dans des rallyes ou des courses sur glace, là où la puissance pure n’est pas absolument nécessaire.
Justement, nous avons fait l’essai de la Citroën DS que le Suédois Björn Waldegård, a piloté lors de la Ronde hivernale de Chamonix en 1972. Mais venons-en au NASCAR. En 1958, la saison de Grand National - l’équivalent de la Cup actuelle - comptait 51 épreuves dont seulement trois présentées sur des circuits routiers.
La 21e manche de la saison, le Crown America 500 (pour une distance de 500 milles, ou 800 km), est tenue le 1er juin sur le circuit routier de Riverside long de 2,63 milles (4,23 km). L’épreuve est réservée aux voitures de deux classes différentes : le Grand National et le Pacific Coast Late Model Series.
Parnelli Jones décroche la pole position aux commandes de sa Ford 1956. Il devance Danny Graves sur une Chevrolet 1957 et Bill Bold à bord d’une Ford 1956.
Mais la foule est agglutinée autour de deux voitures françaises vraiment inconnues aux États-Unis : des Citroën ID. Ralph Roberts conduit la ID No. 101 et s’est qualifié en 30e place (sur 46 inscrits quand même) tandis que son coéquipier, Bill Jones, pilote la ID No. 100 et s’est qualifié en 31e place. Les deux voitures sont inscrites par Citroen Cars Corp.
Les deux voitures sont strictement de série à part les modifications imposées par le règlement, soit l’installation de ceintures de sécurité, d’un arceau de protection (et pas une cage) et le retrait des sièges passagers.
La photo ci-dessus est de très mauvaise qualité, je l’avoue, mais elle est la seule qui existe de la Citroën et est probablement tirée d’un journal de l’époque.
La Citroën ID à traction était une version simplifiée, moins luxueuse de la DS. Elle était propulsée par un moteur de série D, un bloc quatre cylindres de 1911 cc à carburateur simple corps, avec arbre à cames latéral (avec culbuteurs et tiges de culbuteurs) et qui produisait la puissance de 70 chevaux à un plus de 4000 tours/minute. Sa boîte de vitesses possédait quatre rapports avec embrayage classique. Pesant juste un peu plus d’une tonne, elle n’était pas lourde, filait à plus de 160 km/h, mais possédait un argument de taille : sa suspension oléopneumatique.
Un avantage technique non négligeable
Les roues ne sont pas connectées à des ressorts et des amortisseurs, mais à des vérins actionnés par de l’huile incompressible mis sous pression par une puissante pompe hydraulique située dans le compartiment moteur.
Quand la voiture roule, sa garde au sol ne varie pas, peu importe la charge. Donc dans les virages, l’ID ne s’incline pas, mais demeure bien à plat, ce qui permet des vitesses de passage plus élevées.
Parnelli Jones démarre en pole position et domine la course. Mais au 147e tour, il perd le contrôle de sa voiture, sort de piste et abandonne. Eddie Gray, sur une Ford 1957, mène les 43 derniers tours de piste et remporte la victoire avec près de deux kilomètres d’avance sur Lloyd Dane. La course de 500 milles a duré six heures et 17 minutes. C’est la première de quatre victoires de Gray en NASCAR Grand National.
Les deux Citroën ont très bien fait. Bill Jones termine 18e, un rang devant son coéquipier, Ralph Roberts. Les deux compères ont complété 160 tours du tracé californien et terminent un et deux dans leur classe.
Les ID ont consommé peu de carburant en tenant une moyenne de 19,3 milles au gallons, soit 12,3 litres/100km. Cette économie de carburant leur a permis de couvrir la distance de 800 kilomètres en ne ravitaillant qu’à deux reprises, ce qui n’était pas le cas des vrais gros stock-cars à moteurs V8.
On peut se douter qu’on n’a plus jamais revu de Citroën en NASCAR, ni dans d’autres courses de stock-cars. Cependant, ces drôles de voitures ont quand même un peu marqué l’Histoire de course automobile.