Jusqu’à ce 19 décembre 2008, les écuries rivales de Ferrari croyaient naïvement que la redistribution des profits engrangés par Bernie Ecclestone et ses entreprises était équitable et juste.
Car depuis le début des années 70, c’est Bernie Ecclestone, propriétaire de l’écurie de Formule 1 Brabham, qui s’occupe de négocier toutes les ententes commerciales avec les organisateurs de Grand Prix et les télévisions mondiales. À la fin de chaque saison, une partie des profits réalisés est redistribuée aux écuries selon un barème prédéterminé.
Depuis le début des années 80, toutes les écuries de F1 sont liées aux Accords de Concorde. Ce document confidentiel stipule tous les détails de l’accord, incluant la distribution des primes de fin de saison (le Constructors’ Championship Bonus (CCB). Les équipes les mieux classées reçoivent (évidemment) d’importantes sommes d’argent contrairement aux petites écuries.
La Scuderia Ferrari s’insurge
La grogne s’installe quand plusieurs écuries considèrent que l’accord qui se termine en 2007 doit être revu. Elles jugent que les grosses écuries, qui profitent déjà de généreux commanditaires, perçoivent trop d’argent alors que les petites structures peinent à disputer une saison complète.
En 2001, ces équipes rebelles créent alors le Grand Prix World Championship (GPWC), un éventuel championnat de F1 dissident qui débuterait en 2008 et qui ne serait pas dirigé par Ecclestone. Ce n’est pas la première fois dans l’Histoire de F1 que des écuries menacent Ecclestone de créer leur propre championnat indépendant.
Cette fois, la possibilité d’assister à un championnat de F1 “pirate” est très plausible. Celui qui met le plus de pression est Luca di Montezemolo, le président de Ferrari, qui déclare que la prestigieuse Scuderia ira courir en GPWC en 2008 si un accord n’est pas trouvé avec Ecclestone.
En 1985, Ferrari, opposé à une décision technique de la FIA, avait déjà menacé de quitter le giron de la F1 pour aller courir en série IndyCar. Et Ferrari avait obtenu gain de cause.
Début décembre 2003, une importante réunion est tenue à Genève avec tous les acteurs de la F1, incluant Ecclestone. Le temps presse et il est crucial, voire vital, de trouver un accord. Les tractations vont bon train et des solutions sont trouvées. Toutefois, ce que presque tout le monde ignore, c’est qu’Ecclestone a fait une faveur à la Scuderia Ferrari pour qu’elle reste en F1… Mais cela est secret !
Tous les acteurs quittent la réunion avec le sourire. Le nouvel accord permet aux équipes d'obtenir une part nettement plus importante des recettes de la télévision et des droits commerciaux. Ainsi, chaque écurie pourra recevoir jusqu’à près de 20 millions de dollars supplémentaires à la fin de chaque saison, ce qui soulage clairement les petites écuries comme Jordan et Minardi qui ne disposent pas de commanditaires majeurs.
Ecclestone piqué au vif
Tout va bien jusqu’en en décembre 2008 quand Bernie Ecclestone révèle délibérément l’existence d’une entente particulière et secrète avec Ferrari. Tout commence par l’intention de la FIA d’imposer un plafond budgétaire aux écuries de F1, ce à quoi Ferrari s’oppose vigoureusement. Di Montezemolo accuse même Ecclestone de ne pas gérer la F1 de manière règlementaire et transparente.
Interviewé par le Times de Londres, Ecclestone contre-attaque et largue une bombe : « Avec tout l'argent supplémentaire que Ferrari reçoit, il (di Montezemolo) devrait le partager avec les autres équipes ». C’est ainsi que les écuries de F1 découvrent, avec stupéfaction, que Ferrari reçoit jusqu'à 80 millions de dollars de plus que toute autre équipe afin d’être loyale à la F1.
« Nous avons "acheté" la loyauté de Ferrari. Notre accord avec l’écurie Ferrari est que nous l’achetions avec cette prime afin qu'elle n'aille pas courir ailleurs » précise Ecclestone.
Jusque-là, personne ne se doutait que Ferrari disposait d’un tel avantage financier. Il faut toutefois se remémorer le principe fondamental de la gouvernance d’Ecclestone : diviser pour mieux régner !