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23 septembre : Une pluie diluvienne cause un chaos épouvantable au Grand Prix du Canada en 1973

23 septembre : Une pluie diluvienne cause un chaos épouvantable au Grand Prix du Canada en 1973

Vendredi 23 septembre 2022 par René Fagnan
Crédit photo: Galeron

Crédit photo: Galeron

L’édition 1973 du Grand Prix du Canada restera gravée dans les mémoires à cause de la pluie torrentielle qui a fortement compliqué le travail des organisateurs et des chronométreurs. Ce Grand Prix fut présenté le 23 septembre 1973 sur le rapide et redoutable circuit de Mosport Park en Ontario.

À cette époque, le chronométrage des voitures était effectué manuellement par un groupe de spécialistes assis dans un gradin à étages érigé à la ligne de départ/arrivée. Chacune de ces personnes chronométrait un, deux, voire trois voitures en piste et notait tout sur des feuilles de papier. Les écuries de Formule 1 disposaient aussi de leurs propres chronométreurs. Si on notait une différence dans les temps enregistrés, les officiels comparaient les chronos et un accommodement était trouvé.

La même chose était effectuée en ce qui concerne le tour-par-tour où les chronométreurs notaient l’ordre de passage de toutes les voitures, tour après tour. Si le temps était sec, tout allait bien. Mais en cas de pluie, les feuilles en papier se transformaient rapidement en véritables aquarelles absolument illisibles !

Dès les premiers essais de ce Grand Prix de 1973, un temps maussade, des averses et du brouillard s’installent sur la région de Bowmanville, là où est situé le tracé vallonné. La visibilité est si compromise que les chronométreurs ont un peu de mal à distinguer les bolides.

Le Suédois Ronnie Peterson installe sa Lotus 72E-Ford en pole position devant les McLaren M23-Ford de Peter Revson et de Jody Scheckter, la Brabham BT42-Ford de Carlos Reutemann et l’autre Lotus pilotée par Emerson Fittipaldi. Les deux Tyrrell-Ford sont en retrait avec François Cevert en sixième place et Jackie Stewart en neuvième position.

Dimanche matin, le 23 septembre, une forte pluie (une autre…) s’abat sur le circuit, ce qui force les officiels à retarder le départ de la course prévue sur 80 tours. La pluie faiblie enfin et le drapeau du Canada est agité, signalant le départ de l’épreuve. La Lotus de Peterson conserve la première place et le passage des voitures commence à assécher la piste.

Le jeune Autrichien Niki Lauda, aux commandes d’une BRM P160E chaussée de pneus Firestone super efficaces sous la pluie, double Peterson et mène un Grand Prix pour la première fois de sa carrière.

Plusieurs pilotes se font piéger sur cette piste glissante et doivent s’arrêter à leurs puits pour des réparations ou faire changer les pneus. Il y a beaucoup d’action dans les puits et les chronométreurs sont passablement occupés à tout surveiller.

La piste est presque sèche et Stewart prend la commande de l’épreuve alors que la valse des changements de pneus s’intensifie.

Une grande première en Formule 1

Au 35e tour, Cevert et Scheckter se disputent la priorité dans un virage et les deux voitures d’accrochent et s’immobilisent en travers de la piste. Il a y beaucoup de débris éparpillés et Cevert se plaint de douleurs aux chevilles. Deux ambulances et des véhicules d’intervention prennent la piste, ce qui rend la situation dangereuse, et passablement chaotique.

Pour la première fois dans l’histoire de la F1, une voiture de sécurité, une Porsche 914 conduite par le pilote canadien Eppie Wietzes, prend la piste pour regrouper le peloton et permettre aux commissaires de travailler en toute sécurité. Cependant, les arrêts aux puits se succèdent à un rythme effréné.

Wietzes immobilise la Porsche à la sortie des puits et attend les instructions provenant de la direction de course. Les officiels annoncent à Wietzes de se placer devant Stewart, mais ce dernier n’est pas en piste, mais dans les puits où il fait changer ses pneus (les arrêts ne duraient pas trois secondes comme aujourd'hui !). Plusieurs voitures qui roulent en piste passent devant la Porsche immobilisée, incluant la BRM de Jean-Pierre Beltoise, la Shadow de Jackie Oliver et McLaren de Peter Revson. Le walkie-talkie ordonne finalement à Wietzes de se placer devant l’Iso-Ford de Howden Ganley alors que ce dernier est en réalité en huitième position. C’est la confusion totale !

Beltoise, Oliver et Revson effectuent un tour de piste à pleine vitesse et rejoingnent l’arrière du peloton mené au ralenti par la Porsche. Mais à cause de l'erreur des officiels, ils ont ainsi gagné presque un tour d'avance sur leurs camarades. Cette méprise, ajoutée à la succession interminable d’arrêts aux puits, remplit d’erreurs les tours-par-tours.

Au 45e tour, la course est relancée sans que personne ne sache avec certitude qui est réellement en tête… Ganley roule devant, mais le véritable meneur est en réalité Oliver qui roule à l’arrière du peloton…

Au 80e tour, un officiel prépare le drapeau à damier. Colin Chapman, patron du Team Lotus, est convaincu que Fittipaldi est en tête et qu’il va gagner la course. Le drapeau ne bouge pourtant pas au passage de la Lotus ! Il est agité devant un groupe serré de quatre voitures. Une confusion monstre règne dans les puits.

Revson, Fittipaldi et Oliver sont absolument convaincus d’avoir décroché la victoire. Les patrons d’écuries sont furieux et agitent des feuilles détrempées, pratiquement illisibles, aux officiels. Ces derniers refont la course, tour par tour, comparant leurs informations à celles des écuries. Tout cela prend un temps fou et les discussions s’éternisent.

Après quatre heures de palabres, Peter Revson est finalement déclaré vainqueur devant Fittipaldi et Oliver. Le Français Jean-Pierre Beltoise est classé quatrième devant Jackie Stewart et Howden Ganley. Ouf !!!