Chercher à faire générer de plus en plus d’appui aérodynamique par leurs voitures a été le principal travail des ingénieurs de Formule 1 depuis des lustres.
Les ailerons avant et arrière sont d’abord apparus à la fin des années 60 avant l’avènement de l’effet de sol avec la fameuse Lotus 78. En 1983, ce phénomène de succion sous la voiture fut limité par la règlementation technique. Cependant, les ingénieurs trouvèrent des moyens astucieux de générer toujours un peu plus d’appui, nécessaire pour faire rouler les voitures à haute vitesse dans les virages.
En lisant très attentivement le livre des règlements de la F1, Harvey Postlethwaite et ses collègues au sein de la petite écurie Tyrrell ont découvert une faille en 1997. Le texte spécifiait les dimensions d’une boîte virtuelle à l’intérieur de laquelle tous les éléments aérodynamiques et de la carrosserie d'une voiture de F1 devaient être situés. Toutefois, la section aérienne située au-dessus des pontons latéraux ne faisait pas partie de cette boîte.
Pour Postlethwaite, il était donc possible de placer des petits ailerons dans cette zone qui, car située en hauteur, profitaient de flux d’air non-perturbés. Des bouts d’ailerons étroits montés sur les supports ont donc été fixés à la carrosserie des Tyrrell 025 à moteur Ford de Jos Verstappen et Mika Salo.
Dès le Grand Prix d’Argentine, disputé sur le circuit relativement lent de Buenos Aires, les Tyrrell ont été munies de ces “chandeliers” hauts perchés surnommés "X-Wings". Ces mini-ailerons vont réapparaitre sur les Tyrrell au cours de la saison 1997 (année du titre mondial de Jacques Villeneuve) lorsque les courses sont présentées sur des circuits lents qui exigent beaucoup d’appui.
Ces X-Wings avaient aussi un autre avantage, celui de permettre aux pilotes Tyrrell de pouvoir suivre d’autres voitures de près – et potentiellement de les doubler – car ces mini-ailerons évoluaient dans un air calme, non perturbé par les voitures qui roulaient devant.
Une nouvelle règlementation technique
Pour 1998, la règlementation de la F1 change et impose des dimensions restreintes aux voitures ainsi que l’utilisation de pneus rainurés. Les X-Wings de Tyrrell deviennent alors une solution facile permettant de récupérer de l’appui. Les experts affirment que les X-Wings bien conçus ajoutaient environ 5% d’appui à la monoplace.
La nouvelle Tyrrell 026 de 1998 est donc conçue pour être munie en permanence de ces X-Wings et non plus d’un bricolage temporaire effectué avec les bouts d’ailerons avant recyclés.
La saison 1998 commence et la mode lancée par l’équipe Tyrrell est rapidement copiée. Les écuries Ferrari, Prost Grand Prix, Jordan et Sauber installent des X-Wings semblables, toujours à la recherche d’appui.
Un incident survient durant un Grand Prix. Lors du ravitaillement en essence et en pneus d’une Sauber, un mécanicien, pris dans l’action, brise accidentellement un X-Wing de la monoplace. Il faut préciser que la présence de ces structures nuisait beaucoup à travail du mécano qui était responsable du ravitaillement en essence.
Lors du Grand Prix de San Marino à Imola le 26 avril, la FIA et son président Max Mosley annoncent que ces affreux appendices aérodynamiques seront formellement interdits dès la prochaine épreuve, soit le Grand Prix d’Espagne.
Officiellement, la FIA craint que des X-Wings soient brisés en essais ou en course et que les débris provoquent des crevaisons. Officieusement, les officiels de la FIA les trouvent absolument disgracieux et désirent les voir disparaître au plus vite.
Les écuries de F1 ont toutes obéi aux ordres de la FIA et n’ont jamais tenté de contourner le règlement. Et on n’a plus jamais revus ces X-Wings.
Note : La photo ci-dessus montre Jos Verstappen, le papa de Max, au volant de la Tyrrell munie des X-Wings.