Ancien pilote de Formule 1 et de circuits routiers, le Colombien Roberto Guerrero a réalisé la pole position à une vitesse record lors des qualifications des 500 Milles d’Indianapolis le 9 mai 1992.

Guerrero était alors aux commandes d’une Lola T92/00 à moteur turbo V6 Buick de 3,4 litres. À cause de la règlementation technique spécifique de l’Indy 500 qui différait de celle de la série CART, ce Buick à culbuteurs de type “stock block” pouvait disposer d’une cylindrée accrue et d’une pression de suralimentation plus élevée.

Le Colombien, qui vivait alors depuis très longtemps aux États-Unis, pilotait pour l’écurie King Racing du pilote de dragsters NHRA Kenny Bernstein. La Lola de couleur verte était commanditée par les huiles Quaker State.

Après avoir fait ses classes en Europe, Guerrero a brièvement couru en Formule 1. Il a piloté pour les petites écuries Ensign en 1982 et Theodore en 1983, et son meilleur résultat en F1 fut une huitième place acquise au Grand Prix d’Allemagne en 1982.

Une fois avoir quitté la F1, Guerrero a émigré aux États-Unis et a couru en série IndyCar. En 1987, il a conduit pour l’équipe Vince Granatelli Racing et a décroché ses deux premières victoires. Cependant, quelques jours après avoir gagné l’épreuve de Mid-Ohio, Guerrero est allé effectuer des essais sur l’ovale d’Indianapolis où il percute le mur de protection. Un pneu a durement frappé son casque et Roberto a souffert d’une grave commotion cérébrale. Les médecins l’ont maintenu dans un coma artificiel durant 17 jours, puis son état s’est amélioré et il récupéré toutes ses facultés.

Ironiquement, à part ce crash, le super ovale d’Indianapolis a toujours souri à Guerrero.  Il a terminé au second rang à l’Indy 500 en 1984, puis troisième en 1985, quatrième en 1986 et deuxième encore une fois en 1987.

Après son accident, Guerrero n’a plus disputé de saisons complètes, se contenant de participer à quelques épreuves avec l’objectif avoué d’un jour gagner les 500 Milles d’Indianapolis.

Pression maximale pour la pole

Ce samedi 9 mai 1992, les averses se succèdent et la piste demeure détrempée. Ce n’est qu’au courant de l’après-midi que les conditions s’améliorent et que l’asphalte s’assèche enfin. Guerrero signe le meilleur temps lors d’une séance exploratoire de 60 minutes à la vitesse moyenne de 232,090 milles/heure (373,433 km/h).

Un adversaire de taille pour Guerrero dans la chasse à la pole position, le Britannique Jim Crawford, explose son moteur Buick durant cette séance exploratoire, ce qui l’empêche de prendre part à la séance qualification.

Cette fameuse séance de qualification, “Pole Day”, débute à 16h. Arie Luyendyk signe une vitesse moyenne de 229,127 m/h (368,665 km/h). Gary Bettenhausen réalise un tour ultra rapide à 229,317 m/h (368,971 km/h), mais sa moyenne sur quatre tours n’est pas assez rapide pour la pole position.

À 17h34, avec moins de 30 minutes à faire dans la séance, Roberto Guerrero prend la piste avec son moteur Buick disposant d’une pression de suralimentation maximale. Il effectue son premier tour chronométré en 38”762 à la vitesse de 232,186 m/h (373,587 km/h) et fracasse le record du tour.

Il remet ça à son deuxième tour effectué en 38”707 (232,516 m/h, 374,118 km/h), puis 38”690 à son troisième tour (232,618 m/h, 374,282 km/h) et finalement il complète son quatrième et dernier tour en 38”692 (232,606 m/h, 374,263 km/h) pour un temps total de 2’34”851 et une vitesse moyenne de 232,482 m/h (374,144 km/h). Il explose le record ! Un fois le ligne d’arrivée franchie, le moteur toussote, la Lola ralentie et s’immobilise en panne de carburant !

En chiffres, cette pole position signifie une vitesse maximale de 241 m/h (388 km/h) dans les deux longues lignes droites.

Il fait froid dans l’Indiana le dimanche 29 mai, jour de la course. Guerrero mène le peloton durant les tours de chauffe en compagnie de Mario Andretti et d’Arie Luyendyk sur la première ligne de départ.

L’incroyable se produit quand Guerrero perd soudainement le contrôle de sa voiture durant ces tours de chauffe ! Il endommage sa Lola contre le mur de béton et sa course s’achève ainsi. Dépité, Guerrero déclare : « Je crois que c’est une combinaison des pneus froids, de la piste froide et d’un surplus de puissance du moteur… »

Triste abandon pour le détenteur de la pole position qui ne peut même pas prendre le départ de l’épreuve…