Le nom d’Alfa Romeo est revenu en Formule 1 en 2019 quand le constructeur automobile italien a décidé de sous-traiter son programme F1 par l’écurie suisse Sauber.
Sans exagérer, l’histoire d’Alfa Romeo en Grand Prix se résume à une série de départs et de retours. Nous allons nous concentrer aujourd'hui sur le retour en F1 qu’a effectué Alfa Romeo en 1979, quarante ans avant de revenir sur la scène avec Sauber.
Alfa Romeo entre en Grand Prix au milieu des années 1920 et connaît beaucoup de succès avant de se retirer juste avant le début de la Seconde Guerre mondiale. Alfa revient en action avec la création du Championnat du monde de F1 en 1950. Elle est sacrée championne en 1950 avec Giuseppe Farina et aussi l’année suivante avec Juan Manuel Fangio. Puis, la firme italienne quitte la F1 et se concentre sur les courses d’endurance.
Alfa revient discrètement en F1 au début des années 70, sans succès. En 1976, la marque s’associe à l’écurie Brabham de Bernie Ecclestone. Le moteur Alfa Romeo 115-12 est un 12 cylindres ouvert à 180 degrés, dérivé du bloc d’Endurance et qui développe 520 chevaux à 12 000 tours/minute. Ce V12 va successivement propulser les BT45, BT46 et BT48, avec, à la clé, deux victoires acquises par Niki Lauda.
Les moteurs sont produits non pas par Alfa Romeo directement, mais pas son département de compétition, Autodelta, situé à Settimo Milanese près de Milan et dirigé par Carlo Chiti, un ingénieur ventripotent qui est incapable de se départir de son imperméable gris pâle.
Les machinistes d’Autodelta manquent un peu de rigueur, et pas deux moteurs sont parfaitement identiques, ce qui provoque la colère de Gordon Murray, le directeur technique de Brabham. Chaque changement de moteur est une opération complexe, car il arrive souvent que les points d’ancrage du bloc ne correspondent pas aux points d’attache du châssis des Brabham !
En 1977, Ettore Massacesi, le directeur général d’Alfa Romeo, donne son feu vert pour la réalisation d’une monoplace - châssis et moteur - 100% Alfa Romeo. Cependant, Ecclestone s’y oppose vivement et brandit le contrat qui oblige Alfa à ne pas fournir de moteurs à une autre écurie et à ne pas inscrire sa propre voiture.
Du retard, beaucoup de retard
Carlo Chiti et le personnel d’Autodelta se mettent quand même au travail, car ils savent pertinemment que le contrat n’est pas éternel… L’équipe fabrique un châssis monocoque en tôles d’aluminium rivetées auquel est greffé un moteur 12 cylindres 115-12. Le V12 est puissant et souple, mais il consomme pas mal de carburant. Les 200 litres d’essence sont répartis dans deux réservoirs logés dans les pontons.
Les suspensions sont à triangles superposés qui activent des combinés ressorts/amortisseurs. Les disques de freins sont en fonte, et les étriers Lockheed à double pistons serrent des plaquettes Ferodo. Les freins avant sont logés dans les roues tandis que les freins arrière sont embarqués (inboard) et accolés à la boîte de vitesses. La carrosserie bulbeuse est l’œuvre de l’aérodynamicien français Robert Choulet du cabinet SERA. Cette Alfa T177-01 pèse 600 kilos, un poids un peu au-dessus du minimum exigé.
La fabrication de la monoplace traîne en longueur. Commencée à l’été 1977, elle s’étire jusqu’au printemps 1978. C’est justement à ce moment que Lotus introduit sa fameuse Lotus 79 qui exploite à fond l’effet de sol. En un instant, la T177 est techniquement dépassée…
Les essais débutent sur la piste de Balocco, qui appartient à Alfa Romeo, avec Vittorio Brambilla au volant. La voiture est chaussée de pneus Pirelli qui n’est pourtant pas impliqué en F1. On note à l’arrière de la voiture un volet intégré à la carrosserie et non pas un aileron traditionnel. En août, la T177 est modifiée pour convenir aux pneus Goodyear et Alfa procède à d’autres essais sur circuit du Castellet dans le sud de la France avec Brambilla et Niki Lauda, pilote Brabham prêté par Bernie Ecclestone.
Début 1979, les essais reprennent avec Giorgio Francia, le pilote d’essais d’Alfa Romeo, et Bruno Giacomelli qui vient d’être couronné champion d’Europe de Formule 2.
La T177 débute en Grand Prix à Zolder en Belgique le 13 mai. Carlo Chiti sait que la voiture n’est pas très compétitive, mais il désire roder son équipe avant l’arrivée de la nouvelle voiture, la T179. Giacomelli se qualifie en 14ème position, ce qui est fort raisonnable, mais abandonne en course au 21ème tour après avoir été percuté par la Shadow d’Elio de Angelis lors d’un freinage.
En France sur le circuit de Dijon-Prenois, Giacomelli se qualifie et se classe 17ème. Brambilla effectue ensuite d’autres essais sur le rapide circuit de Hockenheim en Allemagne.
Au Grand Prix d’Italie à Monza, Alfa Romeo inscrit deux voitures : la T177 pour Brambilla et la nouvelle T179 à moteur V12 étroit pour Giacomelli. Le vétéran Brambilla se qualifie au 22ème rang et termine 12ème. Après avoir disputé une course hors-championnat à Imola, la T177 tire sa révérence et prend la direction du musée.
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