Avec un coup de pouce financier de son commanditaire principal, le cigarettier West, l’écurie de Formule 1 McLaren a conçu et fait rouler une biplace de Formule 1 aux performances proches des monoplaces normales.
Les stratèges de marketing de West, une marque d’Imperial Tobacco, étaient convaincus que d’amener des stars, des athlètes et des personnages politiques effectuer des tours de circuits à bord de cette biplace allait générer des retombées médiatiques extrêmement profitables. Ils ne s’étaient pas trompés.
Selon McLaren, tout a commencé en 1989 avec la création de McLaren Cars et les premiers travaux effectués sur sa super voiture sport, la McLaren F1, et sa disposition unique de ses sièges “1 plus 2”. L’idée de modifier une monoplace de F1 pour pouvoir amener des privilégiés encaisser les incroyables forces G générés par un tel bolide germe ensuite dans l’esprit de quelques ingénieurs McLaren et les gens du marketing de West.
Un des graphistes de l’écurie McLaren à ce moment, Andy Blackmore, réalise alors une esquisse d’une F1 biplace blanche et rouge, car l’écurie britannique était alors commanditée par Marlboro.
Une fois le projet approuvé par la haute direction, le travail de conception démarre, supervisé par Gordon Murray qui était à cette époque le directeur technique de McLaren Cars. Une fois les grandes lignes validées, Murray passe alors la main à Barry Lett qui finalise le design de la biplace.
Pour Murray, il était crucial et impératif que cette voiture réponde aux normes de sécurité de la FIA en ce qui concernait les impacts frontaux, les impacts latéraux et la protection de la tête du pilote de son passager.
Il est donc décidé qu’au lieu de simplement allonger la monocoque et de la rigidifier, McLaren va produire une toute nouvelle coque, plus courte, et intégrant les pontons afin d’offrir une protection accrue en cas d’impact.
Le reste de la voiture comme les suspensions, les ailerons, le cockpit, le moteur atmosphérique Mercedes-Benz V10 FO 110G d’une cylindrée de trois litres et la boîte de vitesses semi-automatique à six rapports va demeurer inchangé.
Puisque la voiture n’allait effectuer qu’une poignée de tours chaque fois, il était inutile qu’elle dispose du réservoir d’essence normal. Ainsi, la capacité du réservoir d’essence fut réduite des deux tiers et le passager, assis derrière le pilote, était logé à l’endroit où se trouvait normalement ce réservoir. Le passager était certes assis plus haut, ce qui haussait le centre de gravité de la voiture, mais offrait du même coup une bien meilleure visibilité.
Une fois terminée, la McLaren MP4-98T est plus longue que la MP4/12 monoplace de seulement 150mm et son poids demeure à 600 kilos.
Le déverminage de la biplace est effectué par le jeune pilote d’essais de l’écurie de F1, Darren Turner, sur le circuit de Brands Hatch le 27 mai 1998. Turner a roulé seul, sans passager.
Par la suite, la biplace est amenée sur plusieurs circuits lors de Grands Prix officiels. Des invités triés sur le volet tels Murray Walker, Max Mosley, Jan Ullrich, Juan Carlos roi d’Espagne, Erja Häkkinen, Michael Douglas, Alberto Tomba et Andrei Medvedev, et des gagnants de différents concours ont le bonheur de rouler dans cette biplace aux performances à couper le souffle.
Lors du Grand Prix de Grande-Bretagne, Martin Brundle réalise un chrono de 1’36” sur l’ancien tracé de Silverstone, à comparer avec le temps de la pole position de Mika Häkkinen sur McLaren en 1’23”271. Il se murmure qu’avec une passagère très légère, Brundle aurait plus tard réalisé des chronos exceptionnellement rapides qui lui auraient permis de qualifier la McLaren biplace pour le Grand Prix. Mais cela reste à prouver.
Plusieurs pilotes se sont acquittés, avec joie, au plaisir d’être chauffeur de taxi F1. Ainsi Brundle, Niki Lauda, Olivier Panis, David Coulthard, Turner et Chris Goodwin (le pilote d’essais de McLaren) ont secoué leurs passagers sur les plus beaux circuits du monde. Entre 1998 et 2001, McLaren aurait ainsi fait découvrir les joies de la F1 à 151 passagers chanceux.
Tous les pilotes ont encensé le comportement routier de la biplace, insistant sur le fait que son équilibre parfait lui donnait à peu près les mêmes sensations qu’une F1 monoplace.
Sortie en 1998, un seul exemplaire de la McLaren MP4-98T a été produit et demeure la propriété de McLaren au Centre technique de l’écurie situé à Woking au Royaume-Uni.