La petite Peugeot 205 a charmé les amateurs de voitures sportives et ses versions aux stéroïdes destinées aux rallyes ont bouleversé le design des voitures de type WRC du Championnat du monde.
Avec ses formes compactes, son empattement réduit, son moteur turbo en position arrière et sa transmission intégrale, la Peugeot 205 Turbo 16 a planté un jalon dans la conception des bolides de WRC.
Si la 205 de série fut présentée au grand public le 23 février 1983 au Réseau Peugeot à Monaco, les ingénieurs de la firme française travaillaient sur ce concept depuis 1978. Peugeot traversait alors une situation financière extrêmement précaire et cherchait à produire une voiture compacte au comportement sportif qui rajeunirait son image tout en rivalisant avec la Renault 5. Ce futur modèle, codé M24 à l’interne, a donc pour mission de sauver Peugeot du désastre financier.
Le cahier de charges est simple : produire une petite voiture sportive, légère, d’une puissance d’un peu plus de 100 chevaux, bien équilibrée et amusante à conduire. Les études sont lancées et le design global de la M24 est confié au bureau de style interne dirigé par Gérard Welter tandis que l’illustre Paul Bracq exécute le dessin de l’habitacle. Cette M24 est le premier projet réalisé avec la technologie informatique de CAO (Conception assistée par ordinateur) chez Peugeot.
Entre en scène Jean Todt, ancien co-pilote de rallye qui vient de prendre la direction du département de compétition de Peugeot, qui propose à la haute direction de monter un programme sportif pour cette nouvelle voiture. Le Championnat du monde des rallyes paraît tout indiqué, car plusieurs constructeurs majeurs s’y affrontent, dont Audi, Opel, Lancia, Ford et Renault. Le nom de la voiture est finalement choisi et ce sera la 205.
Les premières 205 de série ne sont même pas sorties des usines que le projet de rallye est accepté et une équipe complète, dirigée par Bernard Perron, André de Cortanze et Jean-Pierre Boudy et basée à Vélizy-Villacoublay en banlieue parisienne, travaille sur la conception de la version WRC répondant à la règlementation du Groupe B.
Cette 205 Turbo 16 possède un châssis en treillis tubulaire, un moteur quatre cylindres en ligne en aluminium de 1775 cc qui crache 365 chevaux placé en position centrale arrière et gavé par un turbo KKK K26, un rouage intégral, un poids plume de 960 kg, une boîte de vitesses à cinq rapports, une carrosserie en polyester et une silhouette très proche de celle de la 205 de série.
La première victoire ne se fait pas attendre
Les essais de la première Turbo 16 commencent en secret entre les mains d’Ari Vatanen (très proche de Jean Todt) et le vétéran Jean-Pierre Nicolas. Le bolide est d’amblé difficile à piloter, car le moteur est pointu et n’est puissant qu’à hauts régimes et le châssis, pas assez rigide, a du mal à encaisser la puissance. Entre temps, l’usine fabrique les 200 exemplaires obligatoires de la 205 T16 pour son homologation par la FIA.
Les soucis techniques sont progressivement résolus, la voiture est acceptée par la FIA et la décision est prise d’engager deux bolides au Tour de Corse, cinquième manche du Championnat du monde des rallyes de 1984. Si Vatanen abandonne après un accident durant la 20e spéciale, Nicolas effectue une course splendide et termine en quatrième place, à 19’54” du vainqueur, Markku Alen sur une Lancia 037 Rally.
Après un double abandon à l’Acropole en Grèce et deux non-participations à des rallyes d’outre-mer, Peugeot impose sa 205 Turbo 16 au Rallye des 1000 Lacs en août 1984. Ari Vatanen et Terry Harryman terminent en première place avec une avance de deux minutes sur Markku Alen. Vatanen va même gagner à deux autres reprises en 1984, au Sanremo et au Lombard RAC au Royaume-Uni. En ne participant qu’à quelques rallyes en 1984, la 205 Turbo 16 se classe troisième au championnat.
Simultanément, les ventes de la 205 de série décollent, d’autant que la fameuse 205 GTi est enfin commercialisée. La 205 devient la deuxième voiture la plus vendue de l’histoire de Peugeot. Durant les 16 années de sa production, de 1982 à 1998, elle aura été vendue à 5,3 millions d’exemplaires.
En 1985, Peugeot Talbot Sport produit un monstre : une 205 Turbo 16 Évolution 2, plus aérodynamique avec un gros (énorme...) aileron arrière, un châssis plus rigide de 30%, un moteur de 550 chevaux gavé par un turbo Garrett et une transmission à six rapports.
Au cours de sa carrière, la 205 Turbo 16 WRC a remporté 16 victoires et deux titres de pilotes et de constructeurs. Par la suite, elle sera encore modifiée et ira courir dans des disciplines aussi diverses que le Rallycross, le Pikes Peak et le Paris-Dakar. Une carrière bien remplie de succès.