Honda, qui motorise les écuries de Formule 1 Red Bull Racing et AlphaTauri, va - encore une fois - quitter la scène des Grands Prix. C’est une occasion d’effectuer un retour en arrière et de jeter un œil sur le fabuleux moteur V12 que le constructeur automobile japonais a créé au début des années 60.
Le fondateur de la marque Honda, Soichiro Honda, était un personnage extrêmement ambitieux. Deux ans seulement après la fin de la seconde grande guerre, il commerciale ses premières bicyclettes motorisées. Puis, Honda se lance dans la production de motos et récolte ses premières victoires en courses internationales. Puis, Honda commence à produire localement ses premiers camions et petites voitures de série.
En 1962, une équipe d’ingénieurs débute les études d’un moteur destiné à la Formule 1, car pour Soichiro Honda, courir en Grand Prix représente une façon unique de promouvoir ses motos et ses voitures, et une occasion formidable de développer de nouvelles technologies.
La petite équipe, menée par le grand patron lui-même aidé de Yoshio Nakamura et Tadashi Kume, extrapole le bicylindre de 250cc à double arbres à cames en tête et à quatre soupapes par cylindre qui propulse la moto de course Honda CR72.
La règlementation technique de la FIA stipule qu’un moteur de F1 doit être d’une cylindrée maximale de 1,5 litre et être à alimentation atmosphérique. Si la plupart des moteurs de l’époque sont des V8, Honda décide de tabler sur un V12 qui est, si on veut, trois moteurs V4 accolés les uns aux autres. En théorie, un moteur multicylindre tourne plus vite, car les pistons et l’embiellage sont de petite taille, donc plus légers.
Le plus étonnant de ce V12 est qu’il est conçu pour être installé non pas longitudinalement à l’arrière du châssis, mais transversalement ! En effet, le moteur a été pensé en même temps que la conception du châssis. Le vilebrequin ne tourne donc pas dans le sens de marche de la voiture, mais perpendiculairement, comme la plupart des moteurs de motos. Le V12 est alimenté par 12 carburateurs Keihin (merci les ajustements !) et compte 12 tubulures d’échappement, soit une par cylindre et six de chaque côté de la monoplace.
Ce moteur, codé RA 271E, est surmonté de 48 soupapes et possède un alésage de 58,1 mm et une course 47,0 mm pour une cylindrée totale de 1495,28 cc. Il développe la puissance de 225 chevaux à 12 500 tours/minute, mais pouvait, semble-t-il, atteindre 14 000 tours sans ennuis. Il s’agit d’un régime de rotation stratosphérique à ce moment ! La sonorité de ce V12 à haut régime est envoutante. Ses envolées lyriques sont incroyablement rapides, presque instantanées.
Pour disputer les derniers Grands Prix de la saison 1964 de F1, ce moteur est installé dans un châssis en tubes d’aluminium conçu par Honda. Le V12 est connecté à une boîte de vitesses manuelle à six rapports. Entre les mains de Ronnie Bucknum, la Honda RA 271 ne fait pas d’étincelles lors de ces trois courses. Par contre, le modèle suivant, la Honda RA 272, va remporter une victoire durant la saison qui suit, en altitude à Mexico, grâce à Richie Ginther.
Selon les informations disponibles, ce V12 Honda était plus puissant de 5% que les moteurs rivaux qu’étaient les BRM, Coventry ou Climax. Toutefois, ce gain de puissance était annihilé à cause du poids de la voiture qui était 20% plus lourd que les autres. Il faut avouer que si le V12 était relativement compact, il était lourd, car cette multitude de pistons, bielles, soupapes, ressorts, arbres à cames, joints et roulements à billes pesait lourd dans la balance.
Le châssis n’était pas des plus efficaces et affichait de l’embonpoint. C’est pour cette raison que Honda a délaissé la conception et la fabrication de son châssis pour confier cette tâche au constructeur britannique Lola pour la saison 1967.
Cette vidéo vous fait apprécier la sonorité extraordinairement aigüe du moteur V12 de Honda...