Si plusieurs cherchent présentement à occuper leur temps libre forcé, l'ancien lauréat du Grand Prix du canada en Formule Atlantique (1997) Bertrand Godin utilise cette période creuse dans les activités en sport automobile pour s’entraîner sur son simulateur de course ainsi que pour trouver des solutions en vue de réinventer ses cours à l’école nationale de police du Québec. Il ne perd pas de vue la situation des séries internationales pour autant, et notamment la F1. Il nous donne son point de vue...
Bertrand, que fais-tu en ce moment pour te tenir occupé ?
« Comme beaucoup, je fais du télétravail… mais évidemment en tant qu’instructeur en conduite d’urgence, je n’ai pas d’élèves ! Je tente tout de même de trouver un moyen de pouvoir enseigner la conduite à distance. J’encourage l’enseignement de la conduite à l’aide de simulateurs. Je fais des essais pour voir comment m’y prendre. C'est intéressant car sur certains logiciels il est possible pour l’instructeur de se téléporter de voitures en voitures pour soutenir les élèves derrière leur volant virtuel.»
Pour faire cela, les étudiants auront besoin d’un simulateur ? Certains n’ont pas nécessairement les moyens ou la place pour se les procurer…
« Nous devons voir comment nous pourrions faire un système de location de simulateurs pour une session. Sinon, maintenant avec les lunettes de réalité virtuelle on est en immersion sans avoir besoin de quelque chose de trop gros comme plateforme. Les coûts de ces systèmes sont de moins en moins chers, car ils sont éprouvés.»
Ce soir, tu participeras à ta première course de terre battue virtuelle. Des débuts qui se combinent avec un but bien précis, lequel ?
« Je vais en effet participer au championnat de terre battue qui est organisé par l’Autodrome Granby. À tous les vendredis soirs à 19h30 nous serons en direct sur la plateforme iRacing, et la course sera diffusée sur la page Facebook de l’Autodrome Granby. Par ailleurs, je m’engage à donner 25$ à la fondation GuardRX pour chaque course virtuelle à laquelle je participe. GuardRX est une compagnie de Trois-Rivières qui tente de trouver un vaccin contre le coronavirus. C'ets évidemment très utile dans la situation actuelle mais je trouve cela important d’encourager des compagnies locales.»
Tu as participé à une première course virtuelle sur iRacing la semaine dernière en NASCAR Truck, mais ce ne fut pas un succès. Pourquoi ?
« Le logiciel iRacing est très nouveau pour moi. Je n’ai pas selectionné des ajustements qui m'ont fait manquer ma course. Par contre, j’ai vraiment hâte de disputer la course sur terre battue ce vendredi soir; c’est incroyable de voir le comportement de la voiture et comment tout cela est proche de la réalité. Les pistes ont été faites avec l’aide de lasers, nous ressentons donc chaque bosse et variation de la surface, et ça se ressent dans le volant. C’est extrêmement réaliste. Le simulateur me permet aussi de rester en forme. Quand j’ai terminé une séance, c’est comme si j’avais fait un entraînement physique.»
Où en sont tes plans pour la saison 2020 de sport automobile ?
« Ils sont tombés à l’eau ! J’avais l’intention de faire le Grand Prix de Trois-Rivières, probablement en F1600 Canada, ainsi que le Grand Prix du Canada en louant une CMV. Il y avait des choses qui se développaient, mais qui n’étaient pas confirmées encore. Malgré le drame, il faut quand même travailler sur le futur, se préparer en s’entraînant mentalement et physiquement. J’essaye de continuer à avoir une vie normale sans que celle-ci normale bien entendu.»
Certains pensent que les choses vont se replacer et d'autres que ce ne sera jamais plus comme avant. Comment vois-tu la situation du sport automobile après cette crise ?
« Il va y avoir une remise en question de notre sport. En ce moment, les courses virtuelles peuvent donner une certaine visibilité mais ça ne suffit pas. C’est certain qu’il va y avoir une crise économique et que nous allons devoir remonter la pente. Il faut accepter que les choses ne soient plus comme avant. Des compagnies devront se refaire, certaines vont probablement quitter le sport. Nous sommes tous perdants là-dedans. Je prêche peut-être contre mon sport en disant cela, mais le monde est en admiration devant les commis d’épicerie, les livreurs, etc. qui se mettent à risque pour que la société puisse avancer. Aujourd’hui, nous avons plus besoin d’eux que d’un sportif. Par contre, si les voix des personnalités et des sportifs portent, alors c’est le temps de lancer des messages et que ceux qui peuvent faire des dons le fassent.»
Que penses-tu de la limite de budget que la Formule 1 veut mettre pour la saison 2021, et surtout, que penses-tu de Zak Brown (McLaren) qui tente de faire descendre cette limite ?
« Je ne crois pas à cette pensée magique de vouloir gérer les budgets. Ça n'a jamais été possible, à aucune époque. La Formule 1 devrait plutôt mettre un terme à la saison 2020. Tout le monde disait que c’était une saison qui allait coûter cher puisqu’ils devaient développer une ancienne voiture en plus d'une nouvelle technologie en vue de la saison prochaine. Ils devraient donc tout annuler et se préparer pour la saison 2021. Bien entendu, cela affectera beaucoup de gens à plusieurs niveaux, mais nous sommes tous dans le même bateau.»